En marchant à Carpentras, j’eus l’idée que Dieu était africain, que son incarnation terrestre n’était autre que le Chanteur et qu’il était notre géniteur, nous les deux amants cosmiques. Je me remis à imaginer qu’il serait là lorsque nous nous accouplerions le Joueur et moi et qu’il aurait son mot à dire dans notre champ érotique. Je n’étais pas emballé mais je crus que nous allions vivre tous les trois ensembles. C’était peut-être la clé qu’il fallait trouver pour que notre réunion au sommet eu lieu.
Je m’assis sur un banc près d’une fontaine. Les agents municipaux avaient éparpillé du sel sur le trottoir pour éviter la formation de glace la nuit. Mes pieds étaient congelés. Des centaines de picotements se mirent en action sur des points d’acupuncture afin que mes deux extrémités retrouvent chaleur et mobilité.
Sur le banc je m’imaginais assis sur les genoux du Joueur. Bientôt je sentis réellement un sexe me pénétrer dans le cul et faire des allers-et-retours. J’étais surpris par la vigueur et la taille du sexe. J’en redemandais et j’étais littéralement secoué sur le banc alors qu’il n’y avait personne d’autre que moi. Pourtant ce sexe existait bien à l’intérieur de moi : je l’appréciais voluptueusement. Il était large et long. Et j’imaginais celui du Joueur ou d’un Africain. J’en demandai un autre. Il était aussi dur à l’intérieur de mes chairs mais plus court. J’exigeai de retrouver le premier et mes vœux étaient exaucés.
La place était décorée de lumières de fête foraine. Je m’assis par terre à goûter le sel et j’imaginai qu’il venait de la Mer Morte et de divers endroits du Proche-Orient, surpris par un goût différent selon les endroits où je le ramassais. Je croyais qu’il arrivait directement de là-bas et je plaisantais avec Adil en me comparant à une chèvre après notre séance de baise virtuelle.
J’entrai dan un bar, allai aux toilettes, suppliai le Joueur de m’enculer comme il l’avait fait sur le banc. C’est alors que je sentis un sexe entrer dans l’anus et se déchainer dans un trip-hard core, ma tête tapant contre les graffitis des murs. Je sortis des WC en me disant que c’était le début de la fin du travail d’approche. Il devait être dans la ville, à bord d’une voiture prêt à m’extraire du café.
Je commandai un alcool, puis un deuxième extrait de la bouteille pendue au dessus du bar avec son doseur. Le Joueur allait m’emmener dans son mas. Il avait réservé une bonne bouteille vin rouge et nous serions émus en dînant, et il me jouerait du piano avec des longs doigts et je sentirais qu’il se dégageait de lui une grande distinction et un art de jouir de tous les plaisirs.
Des jeunes faisaient la fête derrière moi. Je ne voyais aucune voiture s’arrêter à la hauteur du café. Je continuai à boire des verres des bouteilles suivantes sur les présentoirs. J’étais surpris de n’être pas enivré par ce mélange d’alcools forts. C’était l’heure de la fermeture, je ne pus payer que la moitié de l’addition et le patron me fit très gentiment signer une reconnaissance de dette.
Je marchais à nouveau, m’arrêtai sous les auvents d’une pharmacie. Des jeunes passaient, je croyais qu’ils m’encourageaient et qu’ils étaient heureux de vivre bientôt le sort qui leur était réservé. Ma tête fut prise dans un orage magnétique qui la fit tourner à droite, à gauche puis se fixer sur le diamètre de la lune qui était pleine ce jour-là. J’enlevais mes vêtements me recouvrant le torse et me caressai les seins. D’autres jeunes qui marchaient firent mine de ne rien voir à ma hauteur. J’étais reparti pour une nouvelle nuit et journée d’errance.
Le lendemain, le distributeur ne m’accorda que 20 euros. Ce fut assez pour entrer dans un piano bar, vers 22 h. En entrant je sentis mes pieds s’enfoncer dans le sol. Celui-ci était devenu élastique et il tanguait comme celui d’un bateau. Personne ne s’en rendait compte. Je crus que c’était le dernier jour, ces phénomènes physiques m’indiquant qu’on avait eu la peau, le Joueur et moi, des flics et des services secrets.
Au deuxième whisky, je m’ennuyais. Une pensée parasite me traversa l’esprit : « je n’aime pas les Noirs ». Je trouvais ça absurde et je fus effrayé . J’avais l’impression de mettre tout en l’air une fois de plus. J’imaginais une colère monstrueuse du Joueur et m’enfuit de Carpentras, marchai le long d’une route départementale, arrivai à un village sans café, désert et inhospitalier. Je me recroquevillai sur le seuil d’entrée d’une maison mais je ne pus dormir à cause du froid et de l’angoisse. Je poursuivis ma route jusqu’à Avignon. J’étais mal parti. J’avais 35 kilomètres à faire et je me sentis épuisé. Les voitures qui passaient ne s’arrêtaient malgré mon appel du pouce.
Au bout d’une demi-heure, l’une d’elle stoppa net à ma hauteur. Elle était conduite par un Maghrébin trentenaire. Il était d’accord pour m’emmener, mit le chauffage, me proposa de la musique pour me détendre et m’offrit des cigarettes. J’avais envie de pleurer devant tant de gentillesse et cette grande sensation de confort. Arrivé dans la banlieue d’Avignon, il m’arrêta devant un Formule 1. Je lui exprimais ma reconnaissance et m’en voulut un peu de lui avoir demandé s’il ne voulait pas monter dans la chambre avec moi.
Il me répondit étrangement :
- Non, je ne peux pas. C’est quelqu’un m’a envoyé vous chercher là-bas.
Je n’ai pas osé lui demander qui.
mercredi 10 mars 2010
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