Mes douleurs céphaliques étaient insupportables. J’avais l’impression que mon cerveau ou son liquide étaient en expansion alors que la boîte crânienne rétrécissait. Les pressions étaient énormes. Si fortes qu’elles s’exerçaient sur ma colonne vertébrale, mes jambes et que mon corps se tordait. Je ne pouvais marcher que 400 mètres, la distance limite pour assurer mes courses alimentaires et assurer une intendance précaire car je ne pouvais rester debout plus de dix minutes, sous peine de me tordre de douleur et d’être terrassé au sol.
Seule l’eau me soulageait. A la piscine, je flottais et ne ressentais plus rien. A l’air libre, j’avais l’impression que toute la pression atmosphérique m’en voulait et désira que je rampe. Mais couché, les douleurs céphaliques devenaient encore plus violentes.
Depuis la révélation à Emmaüs que le Joueur était mon amant et correspondant cosmique, je pris l’indécrottable habitude de lui parler tout le temps. Cela accrut mes douleurs et la puissance du magnétisme qui enserrait ma tête et la faisait déplacer contre mon gré. Après la lecture de l’Equipe, quand je réalisai avec dégoût que ce Joueur était devenu Mister Money, roi du système publicitaire, les douleurs à ma tête étaient devenues insupportables. J’avais la sensation de subir des coups de foudre et de colère des forces magnétiques. Le Joueur devait être passablement agacé : il fulminait, il se révoltait contre mon avis sur sa personne, il criait à l’injustice contre le contre-sens, le jugement hâtif, la tentation facile de céder aux apparences.
Nous eûmes une explication. J’étais assis sur le canapé du salon. J’eus l’idée de sophitiquer l’utilisations des lettres pour nous comprendre. En guise de question, je n’avais qu’à formuler des hypothèses. Si le Joueur la validait, il n’avait faire plonger ma lettre sur le A ou le O, puisque nous étions « l’alpha et l’oméga » ! Si l’hypothèse était mauvaise, il n’avait qu’à me diriger sur n’importe quelle autre lettre.
Avais-je réellement des pouvoirs liés à l’atome, au champ magnétique, à la lumière ? Ma tête se dirigea sur la lettre O de ma télé Sony. En avait-il aussi ? Oui. Ne jouait-il pas un double jeu en se transformant en hommes d’affaires ? Oui. Etait-ce au final pour dénoncer les turpitudes de ce monde qui le mettait dans certaines confidences et le formaient aux plus tragiques techniques de communication ? La réponse était toujours oui.
Je retrouvai le Joueur de 98, sa forme de bonté, son sens du combattant, son art de la stratégie.
Les questions-réponses durèrent des heures, des jours et des nuits. Et il fallait que je sois incroyablement précis dans l’énoncé de mon hypothèse sinon je pouvais être recalé pour un détail. Il suffisait de repréciser les choses et le savoir constitué sur notre nature, nos utopies, notre projet pour les réaliser et les moyens pour réussir avançait.
J’étais rassuré et inquiet sur un point. J’étais un hermaphrodite caché, incomplet. Je le savais intérieurement par mes fantasmes, mes pratiques sexuelles, mes manières de vivre amoureusement mais j’avais tellement lutté pour le dissimuler et j’avais la honte que ce soit exposé publiquement. J’allais devenir une belle femme et rester un homme. L’adoption d’un genre dépendrait des moments, des humeurs, des désirs et de petites caresses nez contre nez.
Cette réversibilité sexuelle assurerait la paix dans le monde car notre singularité atomique était telle que notre rencontre, nos ébats amoureux auraient un effet tellement radical sur les bombes, les missiles, les armes conventionnelles que leur efficacité serait réduite à néant. Elles deviendraient aussi inoffensives que de vieilles casseroles. Les fusils, carabine, mitraillettes seraient enrayées. La pulsion criminelle disparaitrait du champ de la condition humaine.
Avec toutes ces révélations, le Joueur me sembla de plus en plus séduisant. Et le fait qu’il fut un génie du ballon me séduisait. C’était un monde que je daubais facilement mais je devenais admiratif du beau jeu et voyaient désormais les joueurs comme les nouveaux artistes planétaires du temps présent.
Jer m’assurais auprès de lui qu’il le partagerait à l’avenir tout son argent mal gagné. Il me répondit quinze fois oui. Je l’imaginais excédé par mon incrédulité. Tous les jours, je lui posais la question tout comme le fait qu’il jouait le rôle d’un noyauteur explosif du nouvel ordre économique et social qui s’était rudement mis en place. Je sentais à la force du magnétisme qu’il ne plaisantait pas avec cela. Nous étions tous les deux la même longueur d’onde pour provoquer des holds-up de Robin des Bois et soulager l’humanité, lui faire connaître l’abondance, la légèreté, la création.
Le Joueur devait être à son poste-clé qui n’apparaissait pas comme le plus sympathique. Mais c’est vrai qu’un inaltérable capital de bonté se dégageait de son regard. De la tendresse, de l’enfance, de la colère, de l’humour. Il avait le cocktail aussi gagnant que sa silhouette était irrésistible…
samedi 23 janvier 2010
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